par Paco
Des milliers de militants radicaux n’ont pas du tout aimé la tarte à la grenade lacrymogène servie par l’OTAN à Strasbourg. Leur colère en annonce d’autres.
L’État sarkoziste voulait l’affrontement. Il l’a eu. Bien avant la tenue du sommet de Strasbourg, les forces de l’ordre (officiellement 9000 policiers et gendarmes et 1500 militaires) n’ont jamais cessé de harceler les militant-e-s anti-OTAN. Arrachages illégaux de drapeaux arc-en-ciel sur les balcons, contrôles d’identité à gogo, survol permanent du village autogéré par des hélicoptères, multiples entraves à la libre circulation des personnes…
Tout, depuis l’état de siège qui a étouffé la ville pendant plusieurs jours jusqu’aux pénibles tractations sur l’organisation de la manifestation, en passant par la criminalisation des anti-OTAN et les interpellations musclées, tout annonçait de sévères colères. L’annonce de la mort d’un manifestant lors du sommet du G20 à Londres n’était pas faite non plus pour calmer les esprits.
Comme d’hab, en fins psychologues, les flics ont su faire monter la pression. Des témoignages mentionnent des conditions d’arrestation humiliantes. Menottés les uns aux autres, les hommes étaient obligés d’uriner en public les mains liées. Idem pour les femmes contraintes d’uriner devant des flics hilares qui immortalisaient la scène en prenant des photos avec leur téléphone mobile. Passons sur les insultes en tout genre… Des manifestants ont aussi filmé des CRS en train de caillasser gratuitement des manifestants très paisibles… Bref, on ne récolte que ce que l’on sème.
Bilan : un hôtel en flammes (à cause de fusées tirées d’hélicoptère par la police ?), un poste de douane désaffecté et un syndicat d’initiative dépouillés, du mobilier urbain abîmé, une chapelle décorée avec une citation de Victor Hugo… De quoi régaler les médias. Côté politique, chacun aura les indignations qu’il pourra. Samedi, Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, renouant avec de vieux réflexes, n’a pas eu de mot assez dur pour qualifier les militants radicaux (parfois accompagnés de jeunes des quartiers dits « difficiles »). « Ces gens ne sont pas des nôtres », affirmait-elle. Aussi autiste, le secrétaire de la Fédération du Bas-Rhin du PCF a condamné « avec la plus grande fermeté les violences gratuites des groupes venus au nom de prétextes fallacieux pour casser. » Quant au maire UMPS de Strasbourg, il a réclamé une justice exemplaire contre les criminels. Quels criminels ? Les fauteurs de guerre, les charognards de la Bourse ou les patrons ripoux ? Non, les manifestants !
Qu’ils soient Allemands, Grecs, Espagnols, Français…, les « casseurs » (à l’exception des éventuels provocateurs assermentés) sont bien des nôtres. Ce sont nos enfants qui, perdus dans un monde immonde, se révoltent. Niant le caractère politique de leurs actions, les politocards traite les radicaux de « casseurs ». Grossière erreur d’appréciation. Qui sont les vrais casseurs ? Casse de l’éducation, casse de l’emploi, casse de l’environnement, casse des libertés publiques…, nos mômes étouffent dans cette société répugnante. Honte aux politiciens qui sont aux commandes d’une société incapable de répondre au désespoir de sa jeunesse.
Grève générale reconductible aux Antilles, actions radicales dans les manifs, séquestrations de patrons…, la guerre sociale prend une sacrée tournure. Une rupture brutale s’opère entre les naïfs qui ne croient qu’aux vertus des urnes et les partisans de l’action directe. On le dira et on le répètera haut et fort : l’action directe peut rimer avec non-violence. On dira aussi que le capitalisme ne supporterait pas longtemps une grève générale internationale, une grève autogestionnaire et expropriatrice. Les patrons ont besoin de nous, mais nous, nous n’avons pas besoin des patrons.
En attendant que ces idées avancent, il faudra subir le climat de guerre civile imposé les puissants. Et les échos qui suivront. Les maîtres du monde ne passeront pas la main en souriant autour d’une tasse de thé. Cette perspective ne nous amuse pas, mais attendons-nous à voir déferler de violentes colères en France et dans le monde. Qui peut croire que les manants vont éternellement laisser les nantis s’empiffrer sous leur nez ? Aucune paix ne sera possible sans justice sociale. Il est temps de mettre un terme aux désordres engendrés par le capitalisme.
Ce n’est pas en s’associant au front libéral anti-« casseurs » que les pacifistes bêlants de la gauche caviar et de la gauche cassoulet vont calmer l’insurrection qui vient. Au contraire ! La frontière est très claire. D’un côté, il y a celles et ceux qui veulent aménager le capitalisme. De l’autre, il y a celles et ceux qui estiment qu’il n’y a pas de capitalisme à visage humain. Ces derniers, jeunes et moins jeunes, « Black Block » ou pas, ne se laisseront pas longtemps enfumer par des manifs dociles et des petites grèves sans lendemain.
Source: http://www.lemague.net/dyn/spip.php?article6005